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Titre : | La charité : L'amour au risque de sa perversion |
Auteurs : | Odile Gandon, Directeur de publication |
Type de document : | texte imprimé |
Editeur : | Paris [France] : Autrement, 1993 |
Collection : | Série Morales, num. 11 |
ISBN/ISSN/EAN : | 978-2-86260-436-7 |
Format : | 249 p. |
Langues: | Français |
Index. décimale : | EV/K (Vertus chrétiennes : humilité, maîtrise de soi, ...) |
Résumé : |
Parler de charité, est-ce parler d’amour, d’un mode d’être au monde qui aurait à voir avec le don et la grâce ?
Pour définir les liens entre les hommes, il existerait alors un registre autre que la violence ou la justice. Aimer l’autre, partager sa détresse, soulager sa souffrance ne seraient plus seulement la réponse à un commandement. Les multiples visages de l’amour composent une figure paradoxale de la charité ; trop complexe, trop riche de possibles, trop insaisissable sans doute. Objet de métamorphoses réductrices, le terme de charité semble devenu synonyme d’aumône. Elle n’évoque plus pour beaucoup que complicité avec un ordre social injuste, “bonne conscience” à peu de frais, compassion masochiste ou mépris condescendant, pour devenir enfin prétexte au tapage médiatique. La mise en acte de la charité, son inscription dans le jeu social et politique entraînent de telles dérives que son nom est devenu inaudible. Qu’en est-il de cet “amour” si vulnérable à la perversion ? Existe-t-il un espace où s’ouvre la possibilité d'actes désintéressés, de partage ou de don sans retour, fragiles brèches qui sans cesse répétées troueraient l’opacité de la violence rentable et efficace qui nous gouverne ? Ces questions essentielles et vitales, que l’on n’ose plus se poser et encore moins énoncer de peur d’être soupçonné de naïveté ou d’angélisme, sont au cœur de cet ouvrage. |
Note de contenu : |
Préface (Odile Gandon) 1. FIGURES DE L’AMOUR : Agape chez les Grecs, caritas chez les Latins sont des noms de l’amour. Dans les traductions grecque et latine de la Bible (Septante et Vulgate), dans les textes des évangélistes et des Pères de l'Eglise, ces noms vont désigner le principe même de la relation de Dieu aux hommes, des hommes a Dieu et des hommes entre eux. Mais le mot « charité » n’a-t-il de sens que dans l'espace de la chrétienté, ce que le syntagme quasiment figé de « charité chrétienne » pourrait laisser entendre ? Miséricorde, compassion, brûlures de l'eros et douceur de l’agape : les multiples visages de l'amour composent une figure paradoxale de la charité. Quelles métamorphoses réductrices l’histoire de l’Occident a-t-elle fait subir à la charité pour que son nom, après être devenu synonyme d’aumône (« faire la charité»), n’évoque plus pour beaucoup qu’une complicité à l’égard d’un ordre social injuste ? - Équité et bonté (Catherine Châtier) : Dans une perspective juive, la Loi n’épuise pas la notion de la charité. Si porter assistance à l’autre est un devoir, il existe aussi l’inépuisable source, hors obligation, hors normes, d’une donation d’amour sans limites, réponse à l’amour qui précède tout, l'amour du Créateur. - Un mot qui prend feu (France Queré) : Dans le paysage de la sagesse antique, un mot scintille d’un éclat renouvelé : agape, souci de l’autre dans l’éclairage de l’alliance avec Dieu. Comment, aux premiers âges du christianisme, se sont très tôt mis en place les enjeux de la charité, entre l’amour du prochain et les exigences communautaires. - L’épiphanie de la miséricorde (Christian Jambet) : Dans la spiritualité islamique, l’amour humain n’est pas disjoint de l’amour divin, chacun ayant sa place dans une hiérarchie cosmique. Si profonds que soient les liens entre la tradition philosophique et théologique occidentale et la mystique islamique, celle-ci n’a cependant jamais proposé la loi d’amour comme forme idéale du lien social. Comment le shî’isme, religion du dévoilement, a-t-il pu se métamorphoser en religion politique ? - Le XVIIIe siècle, de la charité à la fraternité (John Pappas) : Dans cette période de mutation des valeurs que fut le siècle des Lumières, la question du fondement du lien social fut au cœur des débats entre les philosophes. Une fois rejetées ses origines chrétiennes, la charité, débaptisée « bienfaisance », pouvait-elle faire figure de vertu laïque, en accord avec la loi naturelle ? Mais y a-t-il nature et vertu sans religion ? Et depuis que, sur la scène révolutionnaire, les idées généreuses sont devenues principes d’action politique et de gestion sociale, la charité vit-elle encore sous la devise de la fraternité ? - Méfiez-vous des mendiants (Alain Brossat) : Pas de charité sans mendiant, mais des mendiants sans charité. Des mille ruses d’Ulysse, stratège de la vendetta, à des siècles de charité au service de l’ordre, les combinatoires infinies du mendiant, du politique et de la charité. Ambiguë et fascinante, la figure du mendiant hante le paysage. Autour d’elle se cristallisent et se déforment tous les enjeux, hier comme aujourd’hui. 2. PIÈGES ET DÉRIVES : Loin d'apparaître aujourd'hui comme une valeur positive, la charité fait naître d’immenses soupçons. Au mieux symptôme d'une sentimentalité naïve, au pire masque hypocrite de la violence, elle évoque tour à tour la « bonne conscience » à peu de frais, la compassion masochiste ou le mépris condescendant. Elle devient prétexte au tapage médiatique, à la manipulation des foules et peut servir de tremplin à la volonté de puissance. Qu'en est-il de cet « amour » si vulnérable à la perversion ? Au cœur même de la charité se camouflent des pièges, le pire étant sans doute d'entendre comme une obligation morale l'injonction à aimer son prochain. Et la mise en acte de la charité, son inscription dans le jeu social et politique entraîne de telles dérives que son nom même devient inaudible. - La « pauvre » Lucie. Enquête en milieu scolaire (Juliette Belly) : Comment l’amour du prochain vient-il aux petites filles modèles ? Dans une classe de CM2 d’un quartier populaire, des enfants de dix à douze ans découvrent et analysent les pratiques charitables chez la comtesse de Ségur... qu’ils réinterprètent à leur façon ! - Le diable au cœur (Isabelle Grellet et Caroline Kruse) : L’écriture littéraire fait jouer le mot charité dans tous les sens. Mais elle préfère le biais, la prise eh défaut, l’obscurité plutôt que la mise au jour des jeux tourmentés de l’eros et de l'agape. Chez Corneille, Flaubert, Claudel, Zweig : quelques figures littéraires de la perversion de la charité. - L’abîme (Maurice Bellet) : Comment vivre l'amour que notre histoire a brisé en trois morceaux ? La parole d'amour réveille la mort, le mal, les monstres endormis. Dévoration de l’autre, perte de soi, obsession insensée du devoir infini : au-delà de ses vertigineuses perversions, la charité peut-elle rouvrir l’abîme de Dieu ? - Journal d’un globe-faussaire (Michel Daëron) : Trois mésaventures « humanitaires » ont laissé à un journaliste un goût d’amertume. Hors de tous jugements sur le principe même de l’aide, il a voulu raconter ces expériences, qui témoignent des risques que court la charité quand elle devient l'instrument médiatique d’un pouvoir, Carnet de bord d’un observateur de la charité « en extrême urgence ». - La loi d’amour et la révolution (Daniel Lindenberg) : Partant d'une autocritique du catholicisme social et du caritatif bourgeois, des penseurs d’origine chrétienne instaurent l'amour du prochain comme fondement d'une société renouvelée. Troisième voie, révolution communautaire, utopie marxiste : d’Emmanuel Mounier à Louis Althusser, un pan souvent occulté de la pensée française au XXe siècle. Mais n’y a-t-il pas là, en définitive, la tentation plus ou moins consciente d’évacuer le politique ? Faute de mieux... - Enquête en milieu associatif et politique (Marie-Odile Terrenoire) : Malgré la répugnance qu’inspire à beaucoup le recours à la charité, qui évoque l’aumône humiliante, il faut se rendre à l’évidence : le renouveau du caritatif est à l’heure actuelle un des moteurs de l’action sociale, qu’elle soit publique ou privée. En quoi la charité peut-elle être un élément de la lutte contre les exclusions ? Bronislaw Geremek, Edmond Maire, Claude Cheysson, Harlem Désir et d’autres proposent des réponses. 3. L’AMOUR TOUJOURS RECOMMENCE : Vouloir mettre la charité en lieu et place de la justice, de la solidarité ou de l’organisation sociale reviendrait à brouiller les cartes, à conforter la confusion, à dissoudre les responsabilités. S’ouvre alors la possibilité concrète d'actes éthiques qui sont d’un autre ressort que ceux de l'intérêt individuel ou collectif, du calcul ou de la puissance. Actes désintéressés, actes de partage ou de don sans retour, fragiles brèches qui, sans cesse répétées, trouent l’opacité d’un monde où règne la violence rentable et efficace. Cependant, pour qu’il y ait charité, suffit-il qu'il y ait attention à l'autre, dans le respect et la sollicitude ? Ou faut-il que se reconnaisse dans la relation quelque chose de cette grâce dont le nom grec charis résonne avec celui de charité? - Le partage de la parole (Micheline B. Servin) : Théâtre, espérance et charité : une trilogie de l’amour et de la vie autour du travail théâtral. Si pour certains professionnels la charité peut être thème de parodie dérisoire ou argument commercial, pour d’autres, comme le théâtre Vollard ou Armand Gatti, l’amour du prochain et l’exigence de partage sont la source d’une création toujours vivante et généreuse. - Faut-il rester de marbre ? (Marie de Hennezel) : Face à la souffrance et à la mort, souvent considérée comme un échec technique, le malaise des soignants auprès des malades en phase terminale est immense, entre l’abnégation où l’on se perd et la froideur de l’efficacité distante. Renouer avec cette disposition propre à l’humain qu'est le désir de prendre soin de l’autre, tel est le chemin d’une réconciliation possible, où donner prend un sens quand on sait - ô combien -que c’est aussi recevoir. - Cet espoir absurde... (Alain de Bures) : L’aide humanitaire, vécue au quotidien dans un village afghan pendant la guerre. Comment, sur fond d’orgues de Staline et de discussions sur le fanatisme islamique, se tissent au jour le jour des liens d’amitié et de partage entre un Européen et les villageois d’un pays dévasté. - L’or mental de Juliette (Nouvelle de Christine Cadiot) : Étrange charité, où l’écoute éperdue cache et révèle la quête de possibles infinis, jusqu’au jour où la perte de soi s’épuise dans le silence de l’autre, où la faillite de l’illusion crée la brèche qui ouvre à l’alchimie du verbe. Du don d’autrui au don d’écriture, récit d’une conversion. - La liberté de dire « je t’aime » Entretien avec l'abbé Pierre, propos recueillis par Odile Gandon et Marie Odile Terrenoire : L’amour et la liberté, la foi et le salut, la justice et la violence, l’humilité et l’action : à la lumière de la charité entendue dans son sens originel se déploient les figures de notre humaine condition. Loin de la tentation d’une compassion doloriste, la force de la charité, inépuisable capacité d’attention aux autres, source de révolte et d’apaisement, de réconciliation et de joie, se nourrit de cet infini qu’est notre soif d’aimer et d'être aimé. - Ni passion, ni vertu (Jean-Luc Marion) : Consacrant la césure entre amour et rationalité, la philosophie a sa part dans les dérives de la charité. Mais l’absence de l’amour en témoigne encore, et indique des chemins de pensée. Alors même que la philosophie s'épuise dans sa figure nihiliste, la question cruciale de l’amour lui ouvre l'horizon de sa survie. - Indications bibliographiques - Biographie des auteurs |
Exemplaires (1)
Code-barres | Cote | Support | Localisation | Section | Disponibilité |
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EV/K 024a | EV/K 024a | Livre | Bibliothèque principale | Livres empruntables | Prêt possible Disponible |